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Des patrimoines incarnés : les dialogues du vivant et de l’archive | Embodiment Practices of Heritage

Thèmes:
Heritage as an Agent of Change (Epistemologies, Ontologies, Teaching)Arts
Quoi:
Regular session
Quand:
9:00, Dimanche 5 Juin 2016 (3 heures 30 minutes)
Où:
UQAM, pavillon J.-A. De Sève (DS) - DS-M260 - SALLE ANNULÉE
Comment:

Les arts du spectacle, les événements festifs, les rituels, les récits oraux, les savoir-faire font désormais pleinement partie du patrimoine culturel au même titre que les collections d’objets et les monuments. La Convention sur le patrimoine immatériel adoptée en 2003 par l’UNESCO vise à assurer leur reconnaissance culturelle à l’échelle locale, nationale, et internationale, ainsi que leur sauvegarde. Ces pratiques culturelles et artistiques se distinguent toutefois des objets patrimoniaux « tangibles » par leur dimension incarnée et performée. Elles engagent des corps, des gestes, des actions ; elles se transmettent entre les individus, les groupes sociaux et les générations de façon directe, d’un corps à un autre, en privilégiant l’oralité, la mémoire corporelle et kinesthésique. Cette logique de transmission relève beaucoup plus du répertoire que de l’archive. À l’inverse d’une collection ou d’un patrimoine que l’on conserve, le répertoire est rejoué, recyclé, actualisé. Il est évolutif, expansif, dynamique et encourage les combinaisons des éléments qui le constituent. Diana Taylor l’envisage comme un ensemble de gestes transmis par le corps à travers des pratiques vivantes, selon un processus pleinement créatif de répétitions et de différences (Taylor).

Cela ne signifie pas pour autant que les documents, les archives, les collections d’objets n’interviennent pas dans la transmission de ces pratiques culturelles incarnées et performées. Au contraire, les enregistrements photographiques, filmiques, vidéographiques, sonores, l’établissement de partitions, de notations ou de scripts, la conservation des costumes, des instruments de musique, des accessoires, etc. sont essentiels et instaurent une dialectique avec les modes de transmission oraux et corporels. Au-delà de leurs valeurs de témoignage et d’authenticité propres à la culture archivistique, ces corpus documentaires sont orientés vers la (re)mise en actes. Ils rendent possibles l’appropriation et l’actualisation des pratiques qu’ils documentent par de nouveaux acteurs qui peuvent les interpréter à leur manière et les transformer. La transmission de ces pratiques culturelles incarnées et performées repose donc sur un dialogue entre l’archive et le vivant. Certains parlent « d’archive vivante », d’autres de « corps archives » afin d’insister sur l’importance d’adopter une approche dialectique, au lieu d’envisager l’archive et le vivant, le document et la performance, les patrimoines matériel et immatériel en termes opposés (Schneider, Lepecki).

Ces modes de transmission qui consistent à perpétuer en actualisant sont fortement ancrés dans les communautés. Ils permettent des formes d’identification, des sentiments d’appartenance à un groupe ou à une nation. À travers les répétitions, ils transmettent des connaissances, des savoirs, des conceptions du monde ; ils confirment des ordres symboliques et sociaux, des valeurs philosophiques, politiques, esthétiques, morales ou des croyances religieuses, etc. Grâce à leur capacité de transformation, ils peuvent suspendre ces logiques de confirmation et d’adhésion et jouer un rôle émancipatoire ou contestataire. Ils ont un pouvoir d’agentivité au sens du terme anglais agency qui désigne la capacité des sujets à agir sur leur réalité sociale. Les modifications et les mutations que les acteurs opèrent permettent aux communautés de se réinventer et de s’adapter aux changements qui surviennent dans leur société et dans leur environnement (Taylor). 

C’est pourquoi patrimonialiser ces pratiques culturelles incarnées et performées constitue un défi de taille. Comment les programmes de sauvegarde peuvent-ils maintenir un dialogue dynamique entre le vivant et l’archive ? Quel sens peut prendre la notion d’authenticité dans ce cadre conceptuel ? Comment ne pas amoindrir la malléabilité de ces pratiques, ni les homogénéiser ? Comment ne pas infléchir leur agentivité ? 

Modérateur.rice
Université du Québec à Montréal
Professeure

Sous sessions

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