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11.20  Melvin Charney et la photographie

La photographie joue un rôle central dans l’œuvre de l’artiste et architecte montréalais Melvin Charney. Penser ce rôle dans le cadre d’une session intitulée « qu’est-ce que la photographie préserve? » permet de jeter un nouvel éclairage sur les diverses utilisations de la photographie par Charney et sur la manière dont il a exploité la valeur indexicale du médium. 

Dès l’adolescence, Charney photographie son environnement, la ville de Montréal. Il parcourt son quartier pour fixer sur la pellicule les paysages du quotidien et s’aventure aussi dans la zone portuaire où il découvre les monuments de l’industrialisation et de la modernité montréalaise. Il développe une fascination pour les énigmatiques silos à grain qui l’accompagnera toute sa vie. Émerge donc très tôt une dualité caractéristique de son interprétation de Montréal qui oppose la vie des quartiers et l’émergence d’une architecture moderne qui oblige à réfléchir à ce qui doit être préserver ou sacrifier. Cette tension est bien présente dans les premiers écrits de Charney sur Montréal, dans lesquels il déplore la démolition de l’habitat populaire, et témoigne de son ambivalence envers les nouveaux méga-ensembles des années 1960.      

En parallèle, Charney découpe des photos publiées dans la presse et accumule ainsi une archive visuelle colossale qui lui servira à produire des œuvres et un discours sur l’architecture. Alors qu’au départ, il traitait ces images comme des objets trouvés qu’il combinait pour créer ses projets, son regard se transforme au tournant des années 1970 : l’ « image-type » devient dès lors non plus un matériau pour l’édification, mais une trace dans un vaste réseau de significations dont il tentera de la structure sous-jacente par une incessante reclassification. Initiée par la création de la Memo Series, cette recherche se poursuivra pendant des décennies par le remaniement permanent du Dictionnaire d’architecture.      

Alors que le Dictionnaire fonctionne de manière horizontale en classant et regroupant une vaste quantité d’images, les premières installations de Charney, telles « le Trésor de Trois-Rivières » ou « les Maisons de la rue Sherbrooke », travaillent verticalement en se concentrant sur une seule image. Celle-ci est interprétée par le dessin et transformée en spectre construit qui est à son tour photographié. Ainsi, l’image première qui a été réifiée par la construction de l’installation revient, métamorphosée, sous la forme d’une nouvelle photographie, que Charney lance dans le cycle de la publication et acquiert une autonomie. Dans cette chaîne, la photographie joue un rôle complexe en enregistrant un processus de transformation qui révèle la signification latente d’images qui auraient été invisibles et insignifiantes autrement. De plus, dans le cas des installations éphémères, comme « les Maisons de la rue Sherbrooke », la photographie devient le dernier chaînon, qui en enregistrant l’évènement, se substitue à l’installation comme œuvre d’art.      

Ma communication revisitera les textes qui ont examiné le rôle de la photographie chez Charney et examinera certains cas de figure pour esquisser les principaux aspects de la préservation photographique dans son œuvre, tant au niveau du processus que de qui est préservé. On notera principalement la mise en branle d’un déplacement qui, à la suite de Foucault, transforme consciemment le document photographique en monument.

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